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American Nightmare (James DeMonaco, 2013)

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Ils sont malins chez Blumhouse Pictures, avec leurs films-concepts au rabais qui génèrent toujours des recettes faramineuses. Sauf qu’au même titre que Paranormal Activity, pierre fondatrice de l’édifice, les films provenant du studio sont globalement très faibles à une poignée d’exceptions près. American Nightmare ne déroge pas à la règle, avec un pseudo-concept vaguement subversif censé témoigner d’un propos de l’auteur mais qui ne tient pas la route une seule seconde tant il est bête. Pour la vision de l’Amérique, on repassera, en se contentant d’un home invasion pas trop mal troussé mais dont l’intérêt reste plus ou moins nul.

Pour son deuxième film en tant que réalisateur, après Little New York, James DeMonaco, scénariste de Jack de Francis Ford Coppola et du remake d’Assaut par Jean-François Richet, semblait avoir des choses à dire. De loin, American Nightmare laisserait presque entrevoir un propos coup de poing contre la bannière étoilée et son culte de la violence, son autorisation du port d’arme et ses tendance ultra sécuritaires. C’est plutôt une bonne chose de voir débarquer des cinéastes contestataires, sauf quand ils ne le sont pas vraiment. Car l’idée de départ du film est tellement bête qu’elle ne peut vraiment émaner d’un esprit affuté qui aurait des choses importantes à dire. En effet, si le principe d’une journée par an, dans un futur proche, pendant laquelle seraient autorisés tous les crimes et délits afin de permettre au peuple américain d’assouvir ses pulsions les plus noires, n’est pas si con, le background de la chose ne vaut pas un clou. Comment adhérer à cette vision selon laquelle le peuple se retiendrait pendant toute l’année pour complètement se lâcher le temps d’une journée ? Comment croire une seule seconde qu’il y ait un impact sur le taux de criminalité et la haine sociale ? Impossible, car cette idée est tout bonnement débile. Dès lors, le high concept d’American Nightmare n’est que du vent, et James DeMonaco semble en être tout à fait conscient tant il l’oublie en cours de route. Et tant mieux, car c’est au moment de laisser de côté sa subversion en carton que le film se montre le plus efficace.

American Nightmare 1 American Nightmare (James DeMonaco, 2013)

Dès lors qu’il ne cherche pas à donner une fausse leçon à ses compatriotes, le réalisateur se laisse aller à une série B extrêmement basique qui s’inscrit dans la droite tradition du home invasion. En gros, une famille, à problèmes, se retrouve enfermée dans leur maison et ils vont subir les assauts de vilains bourgeois qui veulent y entrer pour tuer quelqu’un. La ligne directrice est assez claire, déjà vue mille fois, mais reste suffisamment efficace de par son sujet qui aborde la peur fondamentale du noyau familial : l’intrusion de l’étranger. Jamais l’idée d’une bâtisse ultra sécuritaire qui se retourne contre ses habitants n’est exploitée, comme le fit David Fincher dans Panic Room, jamais l’idée de l’invasion ne va plus loin que la peur de l’autre (l’autre, résumé ici à la jeunesse bourgeoise en mal de sensations fortes ou au sans-abris noir). On est loin de Funny Games par exemple, d’Otage ou des Chiens de paille. American Nightmare reste très basique, beaucoup trop pour provoquer un quelconque intérêt, d’autant plus qu’il n’est pas aidé par des personnages à peu près aussi cons que le concept de base, et un scénario truffé d’incohérences. Il faut oublier toute notion de réalisme dans les réactions et comportements des personnages tant ils semblent se donner pour objectif de bafouer toute forme de logique. Cependant, si le film est bel et bien crétin, dès lors que les attaques s’enchaînent et que la sécurité de la maison tombe, il développe une certaine sauvagerie qui fait plaisir à voir et tente d’accentuer le bodycount à grands coups de shotgun ou de hache. C’est dans le bis pur et dur qu’American Nightmare se montre le plus convaincant, même s’il reste désespérément bas du plafond.

American Nightmare 2 American Nightmare (James DeMonaco, 2013)

Le souci est que le film essaye de dire des choses, mais le fait avec une telle maladresse qu’il en devient un brin ridicule. Notamment en oubliant son propos en cours de route, en ne développant rien des germes de constat. Par exemple, l’idée d’une sorte de secte de petits bourgeois masqués qui vont casser du pauvre le temps d’une nuit ne mène à rien. Les masques tombent très vite et la secte se limite à son leader, sans doute le personnage le plus intéressant de tout le film, campé par un Rhys Wakefield en roue libre. Les crimes se limitent bêtement à des meurtres, passant ainsi à côté de toute la portée subversive de l’idée (vols et viols sont totalement absents), et même le final et son petit retournement de situation n’apporte rien de nouveau. Il n’a d’ailleurs rien de vraiment surprenant tant James DeMonaco manque de subtilité lors de son exposition. De son côté, avec une histoire aussi bête à raconter, le réalisateur assure plutôt au niveau de sa mise en scène, avec une petite tendance au surdécoupage. Le seul véritable problème, au niveau du visuel, vient du fait que la majeure partie du film se déroule de nuit et que de nombreuses scènes manquent cruellement d’une source de lumière nécessaire à comprendre quelque chose à ce qui se déroule dans le cadre. L’obscurité comme cache-misère, un des artifices préférés de Blumhouse. De la même façon, le réalisateur tente de masquer son absence d’idées en jouant sur l’effet de répétition, qui finit par lasser dans le dernier acte. Un personnage en attaque un autre, la victime est en mauvaise posture et va se faire tuer, mais miracle, quelqu’un arrive et bute l’agresseur. Et ainsi de suite, à tel point que les enjeux dramatiques sont réduits à néant par cette structure faite d’automatismes ringards. Au milieu de tout ça, Ethan Hawke et Lena Headey sont légèrement à la peine pour donner du corps à leurs personnages légèrement vidés de substance. On retiendra surtout la relative efficacité du dernier tiers et cette volonté de tuer du bourgeois hystérique dans la joie et la bonne humeur, ainsi qu’une ambiance qui fonctionne plutôt pas mal, mais American Nightmare et son pauvre concept pour neuneus et son écriture sans aucune rigueur ne risquent pas de marquer les mémoires.


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